« Des bulles pour l'abolition »

La BD comme vous ne l'avez jamais lue

Pédagogique, sensible et accessible à tous, l’exposition « Des bulles pour l’abolition » présente une sélection mondiale de vingt planches de célèbres illustrateurs, dont les histoires, chacune dans sa singularité, font écho aux principaux arguments abolitionnistes. Entrez dans le monde de chaque artiste, accédez à sa vision et découvrez la cause abolitionniste.

L'exposition a été créée par ECPM à l'occasion du 7e Congrès mondial contre la peine de mort, et exposée sur les grilles du Parc de Bruxelles, juste en face du Palais Royal, en février 2019. Elle a aussi été exposée sur le stand d'ECPM en septembre dernier à Paris, lors de la Fête de l'Humanité.

Cliquez sur l'une des planches ci-dessous pour l'agrandir, ou téléchargez le livret de l'exposition.

Des bulles pour l'abolition sur les grilles du Parc de Bruxelles, février 2019 © Adèle Martignon
L’Araignée de Mashhad, 2017, Mana Neyestani

 

Toutes les familles de victimes ne soutiennent pas la peine de mort.

Avec une moyenne de plus d’une exécution par jour en 2017, l’Iran est le pays qui a compte le plus grand nombre d’exécutions par habitant au monde. Au moins 517 personnes ont été exécutées en 2017, et au moins 221 condamnations ont été pardonnées par les familles de victimes de meurtre.

Actuellement 32 pays sont en moratoire : aucune exécution n’a été conduite depuis plus de 10 ans, mais elles peuvent reprendre à tout moment.

Les moratoires sont des mesures fragiles auxquelles plusieurs pays ont mis fin arbitrairement. Le Tchad avait adopté un moratoire de 12 ans, avant d’exécuter 9 personnes en 2003. La Gambie n’avait plus exécuté depuis 27 ans avant de fusiller 9 personnes en 2012. Quant à la Thaïlande, elle n’avait pas eu recours à la peine capitale pendant 9 ans, avant d’exécuter 2 trafiquants de drogue en 2018.

Le petit bourreau de Montfleury, Marty Planchais

C’est avec l’apparition d’une réglementation étatique de la peine de mort que des exécuteurs furent désignés de manière attitrée.

Initialement, les bourreaux étaient occasionnels et exerçaient un autre métier. Avec le temps, l’exécuteur public est devenu un officier de justice.
Entre 1982 et 1999, Jerry Givens a mis à mort 62  condamnés dans l’État de Virginie aux USA. « Je n’ai jamais aimé cela, précise-t-il. Pour moi, à chaque fois qu’une exécution était annoncée, cela signifiait que j’entrais dans le rôle inverse, je devenais celui qui doit prendre une vie. »

Autopsie d’une invention : Guillotine, Marie Gloris Bardiaux-Vaïente, Rica

Il n’existe pas de méthode humaine d’exécution.

Les principales méthodes d’exécution utilisées en 2017 et 2018 à travers le monde ont été les suivantes : la chaise électrique, la décapitation, la pendaison, le peloton d’exécution et l’injection létale. Celle-ci a été adoptée pour la première fois en Oklahoma en 1977 puis utilisée au Texas en 1982, créant un précédent. Par la suite, les autres États rétentionnistes ont décidé de la mettre en application. À l’instar de la guillotine qui n’est plus utilisée aujourd’hui, elle est considérée par ses partisans comme un châtiment moderne et « plus humain ».

Le dernier jour d'un condamné, Victor Hugo, adapté par Stanislas Gros

Fin 2017, dans le monde, au moins 21 919 personnes se trouvaient dans le couloir de la mort, détenues pour la plupart dans des conditions contraires aux standards internationaux.

Ahmed Haou a passé 10 ans dans le couloir de la mort au Maroc, pour avoir manifesté « pacifiquement » contre le régime du roi Hassan II. Depuis sa libération en 1998, il témoigne des actes d’humiliation qu’il a subis et qu’il qualifie de torture quotidienne et méthodique. « La  porte de ma cellule s’est ouverte, à plusieurs reprises, non pas pour m’exécuter, mais pour me terroriser », confie Ahmed qui milite aujourd’hui pour l’abolition de la peine capitale dans son pays.

Idées noires, l’intégrale, Franquin

 

La peine de mort affaiblit la conception même de justice, qui condamne ceux qui tuent.

Le fait d’ôter une vie se trouve légitimé par les pays qui pratiquent la peine capitale. Cette dernière constitue ainsi une vengeance d’État qui perpétue le cycle de violences et de souffrances.

Gift, Peer Meter, Barbara Yelin

La peine de mort n’est pas dissuasive et ne rend pas la société plus sûre. 

Quand un État juge que la vie n’a pas de valeur sacrée, il diffuse cette idée parmi ses habitants. C’est ainsi que la violence entraîne la violence. Au final, les pays qui utilisent la peine de mort ont des taux de criminalité plus fort que ceux des pays abolitionnistes. Le comté de Harris à Houston, Texas, a exécuté 130 personnes depuis 1982, plus que tous les autres États américains hormis le Texas. Pour autant, le taux de criminalité y a augmenté de 400% depuis que la peine de mort y a été rétablie en 1976.

Mafia Story, volume 5, David Chauvel et Erwan le Saëc

La peine de mort est un châtiment cruel, inhumain, dégradant.

Une punition qui interdit tout espoir est en réalité une torture. Les condamnés à mort vivent dans la peur constante d’être tués, et cette terreur perpétuelle dure bien souvent vingt ou trente ans. Pendant toutes ces années, dans de nombreux pays, ils sont souvent maintenus à l’isolement, vivent dans un dénuement extrême et sont torturés. Tommy Arthur, condamné à mort en Alabama, a vu, en 2016, sa date d’exécution repoussée à la dernière minute pour la septième fois depuis quinze ans. Il a donc passé sept fois sa dernière nuit, a dit adieu sept fois à ses proches et a vécu sept fois la terreur de son exécution imminente.

Les Enfants de la liberté, Alain Grand, Marc Levy

La peine de mort est un outil de répression politique.

La plupart des pays qui utilisent la peine capitale ne résistent pas à la tentation d’en faire un outil de répression politique et/ou religieuse. On ne manifeste pas, on ne se bat pas contre une politique gouvernementale, quand le simple fait de donner son avis suffit à vous envoyer à l’échafaud. En 2018 en Arabie saoudite, Israa al-Ghomgham, une jeune femme activiste de 29 ans, a été condamnée à mort à la demande du procureur public saoudien, pour son engagement en faveur des libertés individuelles.

Shenzhen, Guy Delisle

En 2017, la plupart des exécutions ont eu lieu en Chine, en Iran, en Arabie Saoudite, en Irak et au Pakistan.

S’il est impossible d’obtenir des chiffres précis sur l’application de la peine capitale en Chine, ces données étant classées secret d’État, les exécutions sont estimées à environ 10 000 par an. Pour les autorités chinoises, la peine de mort reste un instrument indispensable par son exemplarité et son caractère dissuasif, même si ces deux éléments sont sérieusement mis en doute par les experts. Elle est ouvertement utilisée comme instrument de répression politique.

Le Pouvoir des innocents, Laurent Hirn et Luc Brunschwig

La peine de mort est une négation de la capacité de réinsertion de chacun.

Susan Kigula a été condamnée à mort en Ouganda en 2002 et n’a cessé de clamer son innocence. Depuis sa cellule, elle a préparé un
diplôme en droit par correspondance à l’université de Londres, ce qui lui a permis de mener un combat aboutissant en 2009 à l’abolition de la peine de mort obligatoire en Ouganda. Susan a retrouvé la liberté en 2016.

Louis Riel, Chester Brown

La peine de mort est une négation de la capacité de réinsertion de chacun.

Susan Kigula a été condamnée à mort en Ouganda en 2002 et n’a cessé de clamer son innocence. Depuis sa cellule, elle a préparé un diplôme en droit par correspondance à l’université de Londres, ce qui lui a permis de mener un combat aboutissant en 2009 à l’abolition de la peine de mort obligatoire en Ouganda. Susan a retrouvé la liberté en 2016.

Le singe de Hartlepool, de Wilfrid Lupano et Jérémie Moreau

Les exécutions publiques cultivent une atmosphère de terreur constituant un outil de contrôle par les gouvernements qui les pratiquent.

Au cours des dernières années, plusieurs pays ont procédé à des exécutions publiques, comme l’Iran, la Chine, la Corée du Nord ou l’Arabie Saoudite. En 2017, Iran Human Rights et ECPM font état de l’exécution d’au moins 31 personnes dans des espaces publics iraniens.

Chicagoland, de Fabrice Colin et Sasha Goerg

La peine de mort tue des innocents. Elle s’applique différemment selon le degré de corruption de la police et de la justice locales, les aléas des enquêtes et les enjeux locaux.

Si aucune justice n’est à l’abri d’erreurs judiciaires, la peine de mort est elle, irréversible. Teng Xingshan a été exécuté en Chine en 1989 pour le meurtre et le viol d’une femme qui avait disparu. Mais cette femme est finalement réapparue en 1993.

Persepolis, Marjane Satrapi

 

La peine de mort crée de nouvelles victimes. Elle étend la souffrance et le traumatisme aux familles des condamnés à mort.

« J’ai dû expliquer à mes petits-enfants que leur mère était condamnée à mort. Le plus grand a 14 ans. Il souffre à l’école car ses camarades se moquent de lui. Son niveau baisse, il est détruit, il souffre. » Celia Veloso (mère de Marie-Jane Veloso, condamnée à mort en Indonésie)

Étre là avec Amnesty International, Christophe Dabitch

La peine de mort est injuste.

Arrêtée en juin 1994, Antoinette Chahine est condamnée à mort en janvier 1997 au Liban, accusée de participation au meurtre d’un prêtre et mêlée malgré elle aux activités de son frère, qui appartenait à un parti politique interdit. Après 5 années d’emprisonnement et une mobilisation internationale importante, elle est finalement innocentée et libérée le 24 juin 1999. À sa sortie de prison, son nom et son calvaire étaient connus dans le monde entier.

The Number 73304-23-4153-6-96-8, Thomas Ott

La défaillance des méthodes d’exécution entraîne parfois de cruelles souffrances.

En 1990 aux États-Unis, l’exécution de Jessie Tafero tourne à la torture. La chaise électrique fonctionne mal, il reçoit trois décharges, sa tête prend feu, il lui faut 13 minutes pour mourir. Deux ans et demi après, il était innocenté. Pourtant, aujourd’hui encore et malgré ce risque, un Américain qui préférait mourir par électrocution que par injection létale, a été exécuté sur la chaise électrique, dans la soirée du jeudi 1er novembre 2018 dans le Tennessee.

Je, françois Villon, volume 1 de Luigi Critone, d’après le roman de Jean Teulé

 

Le blasphème et l’apostasie sont reconnus comme des motifs justifiant la peine capitale dans plusieurs pays.

Asia Bibi, de confession chrétienne, a été condamnée à mort pour blasphème en 2010 au Pakistan. Elle est finalement acquittée en appel par la Cour suprême en octobre 2018.

Capote in Kansas, Ande Parks et Chris Samnee

Aucun État ne devrait avoir le pouvoir d’ôter la vie à un citoyen.

Les États-Unis sont l’une des trois démocraties qui appliquent encore la peine de mort dans le monde, avec le Japon et l’Inde. Nous constatons tout de même un net recul de l’utilisation de la peine de mort aux USA : en 2018, le pays compte 20 états abolitionnistes, 19 rétentionnistes et 11 en moratoire.

La planche bonus : Indélébiles, Luz